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N'y pense plus
8 décembre 2009

l'époustouflant spectacle

Chassés croisés 

Cette semaine a été riche en événements ! Je crois que je ne peux même pas vous dire si j’ai avancé dans mes recherches.

J’ai bien fait ce que je vous avais dit dans mon précédent billet. Je me suis d’abord rendu à l’hôpital. J’ai eu de la chance, j’ai rencontré une infirmière qui avait souvent côtoyé Emma durant son séjour. Elle était même devenue sa confidente.

Au début, j’étais très content de ce qu’elle me disait : Emma avait presque tout oublié de sa vie, même son nom de famille. Tout… sauf moi ! Elle a parlé de moi à cette infirmière, elle lui a même confié que j’étais son grand amour ! J’ai alors pensé qu’elle n’arrivait simplement pas à se souvenir de mon nom ou de l’endroit où j’habitais. Voilà pourquoi elle n’était jamais revenue vers moi !

Mais j’ai vite déchanté. La suite de ses révélations m’a mis à terre.

_ Et je ne suis pas sûre non plus que ce que je vais vous dire va vous plaire. L’accident a changé Emma. J’ai essayé de la soutenir du mieux que j’ai pu mais elle était vraiment à bout lors de son séjour. La vie lui était insupportable. Imaginez : vous perdez vos amis, vos souvenirs, toute votre vie en fait ! Pour la réconforter, je lui disais qu’elle devait prendre l’accident comme un nouveau point de départ, une chance de tout reconstruire. Moi, si je pouvais repartir à zéro, je ne serais pas dans cet hôpital, je m’accrocherais à mes rêves. Elle m’a répondu que c’était le contraire pour elle. Ses rêves, elle les avait réalisés, et elle les avait maintenant perdus. La danse, vous… elle n’avait plus rien qui la pousse à continuer. Je me souviens parfaitement de cette phrase qu’elle m’a dite un jour : « quand on a déjà tout perdu, il ne reste plus qu’à se perdre soi-même ». Et je crois qu’Emma cherchait à « se perdre » par tous les moyens : elle s’est faite surprendre deux fois dans la pharmacie en train de voler de la méthadone. Elle a quitté l’hôpital dès qu’elle a pu, contre l’avis de tous les médecins qui la suivaient. J’évite de penser à elle maintenant… j’ai peur de ce qui a pu lui arriver. »

            Théo fut d’abord abasourdi par cette information. Mais en y réfléchissant, elle ne l’étonnait pas vraiment. Il le savait : Emma était une personne extrême. Seulement, il l’avait connue dans une période où tout allait pour le mieux, une période où son état d’esprit était excessivement positif. Et même si l’univers de la drogue lui était totalement étranger, il comprit qu’Emma était une cible idéale. Elle vivait ses émotions, même les plus sombres, si intensément qu’elle avait dû chercher à soulager sa souffrance par n’importe quel moyen.

Je me suis peut-être montré lâche, mais ma première réaction a été de me mettre à la recherche de l’autre Emma. Vous savez, celle qui danse toujours, celle que j’ai aperçue dans le magazine chez les parents de Sophie. Ça me faisait trop mal de penser qu’elle ait pu basculer dans l’enfer de la drogue. Si l’infirmière disait vrai, elle avait logiquement dû céder à l’héroïne après ses shoots de méthadone.

Je me suis alors demandé comment je pouvais retrouver Emma la danseuse, celle qui avait miraculeusement guéri sa cheville. La réponse m’a paru évidente : il fallait que j’aille voir un des spectacles de la troupe.

Ce fut donc à « l’Etoile du Nord », dans le 18ème, qu’il se rendit en premier. La troupe « Joly » devait y présenter sa dernière chorégraphie, plébiscitée par les critiques. La salle comptait à peine deux cents places, et le ballet dansait bien entendu à guichet fermé. A l’entrée, Théo proposait à chaque spectateur de lui racheter son billet. Il fit monter les enchères au fur et à mesure des refus, jusqu’à ce qu’un homme hésite, puis lui cède finalement sa place pour le triple de son prix. Du premier rang, Théo pourrait scruter tous les danseurs qui allaient fouler la scène.

            Tiens, encore un couple bien assorti à côté de moi ! La beauté de la jeune trentenaire se marie très bien avec la Rolex de son vieux compagnon… Ils doivent avoir quoi, trente ou trente cinq ans d’écart. Et encore s’il n’y avait que l’âge ! On a l’impression qu’elle vient tout juste de mettre fin à une carrière de mannequin alors que lui est petit, bedonnant et vu la façon dont il lui parle, il n’a pas l’air d’être un rigolo. Je me demande de quoi elle est le plus amoureuse : sa gold, le loft qu’il a dû acheter dans le 16ème ou la Porsche avec laquelle ils sont probablement venus ? Et j’aimerais aussi savoir comment il l’a séduite… Au beluga ?au Tiffany’s ?

La salle et les tergiversations de Théo se turent aux extinctions des lumières.

J’ai passé la moitié de la représentation à me tordre sur mon siège pour tenter d’apercevoir Emma. Je commençais vraiment à me sentir bête d’avoir payé ma place une fortune, tout ça pour rien.

Et puis, trois nouvelles danseuses ont fait leur entrée. Elles étaient maquillées et déguisées de façon à ressembler à des hommes. C’est pour cela que ça ne m’a pas sauté aux yeux tout de suite. Mais, soudain…

Il fixait le visage qui tournoyait sur toute la largeur de la scène, passant parfois même devant son siège. C’est de cette manière que leurs regards se croisèrent durant un infime instant. Cet éclair sembla foudroyer Théo aussi bien que la jeune femme. Pour le garçon, la décharge qu’il avait ressentie le long de son dos n’avait pas pu être provoquée par une autre personne qu’Emma. Il balaya ses derniers doutes, poussé par l’envie de faire de cette jeune danseuse celle qui l’avait délaissé. Il tenta d’obtenir confirmation, se tordant dans son siège pour apercevoir une nouvelle fois ce profil familier. Si c’était bien elle et qu’elle l’avait également remarqué, elle le regarderait à nouveau ! Mais ce fut tout le contraire : la ballerine devint insaisissable. Sa tête virevoltait si vite durant les rares moments où elle se tournait vers le public que l’on pouvait la confondre totalement avec un homme.

A sa sortie de scène, je me suis précipité dans les coulisses pour l’intercepter. Je touchais au but quand Alain m’a barré la route... Il m’a menacé d’appeler la police si je ne partais pas.

Et voilà, je suis donc chez moi en ayant la certitude d’avoir vu Emma et que son chorégraphe m’a menti pour la protéger de je ne sais quoi.

Mais je découvrirai tout, je vous le promets. Je trouverai le moyen de faire parler Alain avant la semaine prochaine.

Je vous dis à lundi, toujours à midi.

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